Les animaux sont-ils « bio-indicateurs » ?

Notre perception des relations entre tous les êtres vivants constituant l’écosystème planétaire doit évoluer au plus vite.
Il n’y a pas de « mauvaises herbes », il n’y a pas de « parasites », ailleurs que dans nos interprétations, nos croyances et préjugés, fonction de nos façons de voir ou de ne pas voir, d’observer ou d’ignorer, de craindre ou d’accueillir, de concevoir et d’imposer notre confort aux dépens d’équilibres plus vastes et infiniment plus complexes.
Il n’y a ni « mauvaises herbes » ni « parasites », il n’y a que des écosystèmes plus ou moins riches en biodiversité, plus ou moins proches de l’équilibre entre les différents éléments constitutifs, plus ou moins modifiés par les agissements humains.
Notre façon de percevoir les relations entre tous les êtres vivants ne constitue pas, ou pas seulement, une approche philosophique, qui consisterait seulement à choisir une « vision du monde », en fonction de notre sensibilité, de nos désirs, de nos attentes. Modifier notre façon de percevoir, et d’agir dans le monde, n’est pas répondre à une mode passagère, mais apporter une réponse lucide à une urgence écologique majeure qui concerne toute l’humanité, et avec elle tous les règnes du vivant en coévolution. Bienvenue dans l’Anthropocène !

Gérard Ducerf a écrit trois volumineux ouvrages à propos des « Plantes bio-indicatrices ». De quoi s’agit-il ? Les plantes bio-indicatrices sont des végétaux qui apparaissent spontanément, se développent, voire envahissent une prairie, une pâture, et donnent ainsi des indications très précieuses sur les qualités et défauts du sol.
Le sol est un énorme réservoir de graines. Ces graines ne germent pas tant que des conditions particulières ne sont pas réunies. Elles sont dites « en dormance ». Une fois les conditions particulières réunies, la levée de la dormance s’effectue : les graines germent. Les conditions particulières à la levée de la dormance des graines sont la géologie, le climat, l’hydrologie (le cycle de l’eau), l’environnement végétal et le sol. A ces facteurs il convient de rajouter bien sûr la présence animale, sauvage et domestique, et la présence humaine, avec toutes les conséquences que cela implique.
Ainsi, ces plantes peuvent nous indiquer très précisément quelles sont les caractéristiques de l’écosystème concerné. Bien plus, l’apparition spontanée de ces espèces ou variétés végétales, méconnues, dénigrées par ignorance, combattues comme non comestibles ou toxiques, est en fait la meilleure réponse possible apportée par l’écosystème aux déséquilibres du moment (asphyxie, compactage, surpâturage, intoxication par l’agrochimie et la pharmacochimie …), la solution la plus adaptée pour régénérer des sols épuisés, maltraités, empoisonnés.

Dès lors, une question s’impose : les animaux seraient-ils eux aussi « bio-indicateurs » ? Des espèces disparaissent, d’autres prolifèrent, certaines porteuses de micro-organismes pour le moins préoccupants (tiques). Et qu’en est-il des animaux « d’hommestiques » (Lacan). Qu’en est-il des équidés ? Qu’en est-il de leurs besoins fondamentaux ? Leur mal-être, leurs maladies, peuvent-ils nous donner des indications précises et précieuses sur la qualité des environnements dans lesquels nous leur imposons de vivre ? La réponse, bien évidemment, est oui ! Et les conséquences quant aux façons d’élever, nourrir, soigner, sont dès lors considérables. Cette bio-indication, nous pourrions la nommer aussi « le sens de la maladie ».

Si les plantes et les animaux sont bio-indicateurs, leurs maladies révélatrices des dysfonctionnements profonds du climat et des écosystèmes à l’échelon planétaire, alors qu’en est-il de nos propres maladies, qu’en est-il de l’humain bio-indicateur ? Oui, bienvenue dans le nouveau monde, bienvenue dans l’Anthropocène !

A suivre … de très près !

Eric Ancelet
Docteur Vétérinaire
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